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“La clé du succès, c’est la qualité !”

Portrait de leaders

Faso Kaba, l’entreprise de Maïmouna Sidibe Coulibaly, vend des semences de sorgho, de maïs, de riz, d’arachide améliorées et adaptées au climat sahélien.

© Abdoulaye Mahamadou

Maïmouna Sidibe Coulibaly

Faso Kaba, l’entreprise de Maïmouna Sidibe Coulibaly, est l’une des principales sociétés de semences améliorées en Afrique de l’Ouest. Rencontre avec une agroentrepreneuse déterminée.

Après un séjour aux États-Unis dans les années 1980, Maïmouna Sidibe Couliby est revenue au Mali convaincue qu’il existait un marché pour les semences améliorées de céréales. Aujourd’hui, son entreprise Faso Kaba travaille avec des organisations internationales de recherche, comme le CIMMYT, le Centre d’amélioration du maïs et du blé, pour tester de nouvelles variétés.

En 2017, vous avez gagné l’Africa Food Prize, avec la professeure Ruth Oniang’o. En quoi votre entreprise est-elle différente et comment a-t-elle séduit le jury ?

Aux États-Unis, les champs donnaient l’impression que quelqu’un les avait tous taillés. Je me suis demandé pourquoi, chez nous, les champs sont irréguliers, avec des plants de différentes tailles, et pourquoi récolte-t-on moins. On m’a répondu que les agriculteurs utilisaient des semences améliorées. Donc je me suis renseignée, j’ai même travaillé dans une entreprise semencière. J’ai décidé qu’à mon retour c’est ce que je ferais pour aider nos paysans à récolter davantage.

Il y a aussi le fait que nous utilisons de petits sachets, vendus en fonction des régions. Par exemple, pour un paysan de Sikasso (sud du pays), nous avons des variétés qui correspondent à la pluviométrie de cette localité. Nous vendons ce qui est approprié à la zone de production. Si vous voulez faire du maïs, nous pouvons conseiller des variétés adaptées au changement climatique et à la faible pluviométrie. Nous avons aussi des variétés de sorgho, de maïs, de riz, d’arachide.

Comment avez-vous surmonté les difficultés liées à la création de votre entreprise ?

Ma mère était une paysanne. J’ai travaillé dans son champ, je voyais qu’elle ne récoltait pas beaucoup. Aux États-Unis, les champs de maïs étaient totalement différents du champ de ma mère et de ceux des autres paysans du Mali. À l’époque, mon mari menait des recherches sur les semences de maïs au rendement élevé, tolérantes aux maladies, à la sécheresse. J’ai décidé que c’est ce que j’allais vendre, parce qu’il n’existait pas de boutique qui vendait les semences de céréales au Mali. De retour, pendant 10 à 15 ans, je n’ai pas eu de financement parce que les gens ne connaissaient pas les semences en vente. J’ai fait le tour des banques et on me disait : “Qui va acheter des semences de céréales ? Les gens ont l’habitude de garder une partie de la récolte et semer cela l’année suivante.” Je leur expliquais qu’aux États-Unis c’est une activité lucrative. Les champs sont cultivés pour produire des semences nettoyées, certifiées, mises dans des sachets pour être vendues. Les banquiers ne me croyaient pas. Jusqu’au jour où j’ai découvert l’AGRA (Alliance pour une révolution verte en Afrique) qui avait déjà travaillé sur le sujet en Afrique de l’Est et en Afrique du Sud. J’ai rencontré des représentants de l’AGRA, qui ont eu confiance en ma société, en mon ambition, en mon idéal. J’ai reçu une subvention étalée sur 30 mois et c’est cela qui m’a lancée. C’était en 2007.

Un an plus tôt, une ONG japonaise, Sassakawa Global, avait donné sa garantie pour mon premier prêt de 5 millions de francs CFA (7 600 €). Il fallait installer au moins 50 vendeurs ruraux au niveau des villages, produire et vendre 180 tonnes de semences, avoir un bureau, du personnel, être déclaré au service des impôts, à la sécurité sociale. On a dépassé tous ces objectifs.

Quels conseils donneriez-vous à de jeunes entrepreneurs qui feraient face au même problème de financement ?

Il faut un minimum de fonds pour se lancer parce que les investisseurs ne donnent rien au démarrage. Ils donnent de l’argent pour améliorer ou agrandir une entreprise, mais pas pour démarrer. Donc il faut tout faire pour se lancer sur fonds propres ou chercher des crédits auprès des fournisseurs. Et il faut avoir confiance en soi, aimer ce qu’on fait. C’est la persévérance et le courage qui peuvent convaincre le bailleur d’investir.

Vous avez commencé en vendant des semences sélectionnées chez vous. Aujourd’hui, votre entreprise s’est considérablement développée. Sur quoi s’est bâti votre succès ?

La clé du succès, c’est la qualité ! Si on vend des semences de qualité, le client reviendra, il informera son voisin et d’autres clients qui viendront à leur tour. Il faut donc mettre l’accent sur la qualité, le respect des engagements, être disponible, bien expliquer les choses aux clients. Aussi, nous vendons des sachets de 1 kilo et de 5 kilos pour que ce soit abordable à toutes les bourses.

Pensez-vous que l’évolution des outils numériques et de leur place dans l’agriculture concerne d’une manière ou d’une autre une entreprise semencière comme la vôtre ?

J’y crois, surtout dans le marketing. Si nous pouvons avoir nos produits en ligne, les gens peuvent les voir, même en étant loin de Bamako, loin du Mali. Ils pourraient acheter en ligne. Aujourd’hui, nous vendons via les services de transfert d’argent par téléphonie mobile. Les gens appellent, nous nous entendons sur la quantité, le prix, on communique notre numéro de compte ou le numéro de téléphone inscrit à Orange Money et le client paye. On lui envoie le colis qu’il récupère à la gare de son village. Ce matin, j’ai vendu pour 250 000 FCFA (380 €) de semences de cette façon.

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