Consommation consciente
Les entreprises agroalimentaires des Caraïbes tirent profit de la production locale de fruits et végétaux nutritifs pour accéder au marché national des denrées alimentaires, boissons et produits cosmétiques.
À Saint-Christophe-et-Niévès, tous les produits alimentaires et cosmétiques dérivés de plantes, d’aromates et de fruits disponibles sont fabriqués par Sugar Town Organics, une entreprise d’agrotransformation fondée par Anastasha Elliot en 2010. La jeune femme a découvert certaines des vertus curatives des fruits et plantes locaux grâce à ses grands-parents de République Dominicaine et d'Afrique. Ainsi, la goyave, utilisée dans sa vinaigrette, possède des propriétés anti-inflammatoires et antibactériennes, et le fruit de la passion, utilisé dans sa sauce piquante, contient des vitamines A et C.
Avant de lancer son entreprise, Anastasha Elliot a suivi une formation approfondie en fabrication de produits bio de soin pour les cheveux et la peau, ainsi qu’en cuisine, pour apprendre comment fabriquer des produits alimentaires. La gamme alimentaire de Sugar Town compte désormais 30 produits, dont des confitures, des sauces, des vins et des liqueurs, commercialisés sous la marque “Flauriel”. Sa gamme de produits cosmétiques “Yaphene” propose 63 produits dont des savons, des dentifrices, des lotions après-rasage, des shampoings, des crèmes pour la peau, des soins capillaires et des produits de bien-être. Tous sont fabriqués à partir de fruits et de végétaux biologiques : anis, fenouil, jasmin, orchidée, rose, corossol, estragon…
Le prix des produits varie entre 5,50 et 100 dollars est-caribéens (XCD), soit entre 1,8 € et 33,79 €. En 2017 et 2018, la hausse de la demande a fait grimper les ventes de Sugar Town de 150 %. “De nombreux spas sont à la recherche de produits locaux à offrir à leur clientèle”, explique Anastasha Elliot. Le ministère du Tourisme et des Affaires étrangères, les hôtels Park Hyatt et Marriott, ainsi que des agences locales de produits de courtoisie s’approvisionnent aussi chez Sugar Town en petits cadeaux destinés aux touristes. Suivant le moment de l’année et le nombre d’événements, l’entreprise génère des revenus mensuels compris entre 2 670 XCD et 6 700 XCD (880 € et 2 200 €).
Chaque mois, l’entreprise achète à une vingtaine d’agriculteurs jusqu’à 90 kg de matières premières qu’elle trasnforme avec de petites machines, comme des déshydrateurs et des mixeurs professionnels. Anastasha Elliot envisage désormais de construire une usine pour augmenter sa production et créer des emplois – elle emploie déjà quatre personnes. D’ici cinq ans, l’entrepreneuse espère être en mesure de vendre ses produits au-delà des Caraïbes, en particulier sur le marché européen.
Des boissons à base de plantes
De son côté, Tanisha Thompson a créé en 2015 Natural Fusion Partners (NFP) avec un capital de départ d’environ 32 000 XCD (10 500 €) provenant de ses économies personnelles. Son but : promouvoir en Jamaïque la consommation de boissons saines, pauvres en sucres et en calories. NFP s’approvisionne chez quatre agriculteurs locaux pour fabriquer son thé glacé à la goyave et son eau aromatisée à l’aloe vera.
Depuis ses débuts, NFP a vendu plus de 850 000 litres des deux boissons à des pharmacies et supermarchés locaux, ainsi que lors de foires commerciales. Les préparations sont vendues dans des bouteilles de 340 ml, au prix de 2 $ (1,78 €). Chaque année, NFP génère près de 21 000 € de chiffre d’affaires et emploie cinq jeunes de 18 à 30 ans, tous de la région.
Tanisha Thompson peine à accéder à de nouveaux
marchés. Peu connue, la marque est seulement présente dans deux paroisses civiles
de la Jamaïque. La participation à des foires agricoles, l’accréditation du
produit par le Bureau de normalisation de la Jamaïque et l’homologation du
ministère de la Santé aident à faire connaître l’entreprise et à accroître la
confiance des consommateurs dans ses produits. Elle explique : “L’agripreneuriat
peut être complexe en Jamaïque lorsqu’on ne dispose pas de beaucoup de fonds
pour financer les différents aspects liés à l’entreprise. Je suis donc devenue
plus patiente et persévérante. On m’a souvent dit “non” mais j’ai appris que ce
n’est pas forcément un non définitif.”