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Des systèmes innovants d’évaluation du crédit pour aider les agriculteurs

finance

Réduire les risques

La difficulté d’emprunter, pour de nombreux petits agriculteurs ne disposant ni de garanties ni d’antécédents de crédit, a fait apparaître de nouveaux systèmes pilotes d’évaluation du crédit pour aider les banques à apprécier les risques que présentent réellement les emprunteurs et tirer parti de ce secteur potentiellement lucratif.

Pour établir des profils de risque précis des agriculteurs sans se fonder sur des données conventionnelles comme les historiques d’emprunt, les concepteurs de systèmes d’évaluation du crédit sont forcés d’innover.

L’évaluation psychométrique

Pour augmenter les taux d’acceptation et réduire les délais de traitement des prêts aux agriculteurs, Juhudi Kilimo, prestataire de solutions financières pour les petits agriculteurs d’Afrique de l’Est, teste la méthode d’EFL Global, une entreprise privée qui utilise l’évaluation psychométrique pour créer les profils de risque d’emprunteurs africains, asiatiques, européens et latino-américains. Cette méthode pilote – financée par la Fondation Mastercard – mobilise les représentants de six agences kényanes de Juhudi qui visitent et incitent les demandeurs de prêts à passer des tests psychométriques sur tablette. Ces tests permettent, selon EFL, de définir leur personnalité, y compris leur self-control en matière de dépenses et budgétisation. Sur cette base, une cote de crédit à trois caractères est alors attribuée aux demandeurs. À partir de son évaluation initiale d’environ 6 000 clients réalisée à l’aide de l’outil d’EFL, Juhudi a constaté que 6 % des personnes classées dans le quintile le plus bas avaient au moins une fois des arriérés de remboursement de 60 jours pour un prêt type d’un an, contre 1,5 % dans le quintile le mieux noté.

Aujourd’hui, Juhudi utilise activement le modèle pour ses décisions de crédit et accepte les clients bien cotés qui auraient été rejetés auparavant pour l’absence de garanties suffisantes, d’antécédents de crédit ou d’informations financières. Le prestataire de services financiers offre aussi à ses clients les mieux classés la possibilité d’accéder à des prêts pouvant atteindre 100 % de leur garantie, contre 67 % sans les données d’EFL.

Néanmoins, même si l’outil d’EFL possède un pouvoir prédictif, le directeur des relations de partenariat de Juhudi, Elvin Walela, souligne qu’il faudrait toujours l’utiliser en parallèle avec des méthodes traditionnelles d’évaluation du crédit. Les visites des agents de prêt dans les exploitations agricoles des demandeurs restent déterminantes pour évaluer les revenus et la solvabilité des agriculteurs, estime-t-il. En outre, certains demandeurs ont trouvé le test difficile ou se sont plaints de sa longueur et de son indiscrétion. Sur ces difficultés, Juhudi cherche des solutions avec, par exemple, l’essai de tests par SMS.

Sécuriser les banques

Les banques souhaitent accroître leurs revenus en prêtant aux agriculteurs mais ne veulent pas prendre de risques. À partir de ce constat, la Fondation Thomson Reuters a lancé l’initiative “Les agriculteurs bancables”, qui vise à établir des profils de risque de crédit grâce à des partenariats avec des coopératives agricoles, des banques, des ONG et des start-up de télécommunications. En juin 2017, elle a trouvé son premier client – une banque commerciale kényane présente sur toute l’Afrique de l’Est.

La banque kényane aidera la fondation à calibrer son modèle d’évaluation du crédit en s’assurant que la sélection et la pondération des données correspondent bien aux besoins des prêteurs, indique Saidah Nash Carter, responsable de l’innovation pour l’Afrique chez Thomson Reuters. L’objectif est de créer un système d’évaluation du crédit si riche en données que les banques n’auront pas peur de prêter aux agriculteurs sans garanties. Le projet travaille actuellement à la création du système avec 60 jeux de données mais, selon S. Nash Carter, les possibilités d’amélioration sont illimitées. Par exemple, les technologies intelligentes liées aux stations météorologiques, pompes à eau et même tracteurs pourraient produire des données utiles.

Des décisions de prêt plus rapides

L’agriculture étant très sensible au facteur temps, la rapidité de déblocage des prêts est cruciale pour la productivité des agriculteurs. Avec les méthodes traditionnelles d’évaluation du crédit, un agriculteur ougandais peut attendre entre 2 et 6 semaines pour obtenir une réponse, selon Tamsin Scurfield, directeur pour l’Ouganda du développement commercial et des partenariats d’Opportunity International. Il explique que l’utilisation de cartes d’évaluation précise du crédit pourrait réduire ces délais à quelques secondes tout en encourageant les banques à prendre des risques, dans la mesure où des décisions de prêt éclairées diminuent les défauts de paiement.

Le système d’évaluation du crédit d’Opportunity International, élaboré en collaboration avec son partenaire local de microfinance Opportunity Bank, sera lancé pour les agriculteurs en octobre 2017. La carte d’évaluation permet aux agriculteurs de gagner des points en se fondant sur 17 variables de valeur égale, dont sept sont liées aux activités agricoles comme la superficie des terres, les cultures exploitées et l’accès à l’irrigation. Les autres s’intéressent aux agriculteurs en tant qu’individus, à leurs ménages, à leurs groupes d’agriculteurs et, le cas échéant, à leurs antécédents de crédit.

Jusqu’à présent, l’initiative a permis d’établir le profil de plus de 6 000 agriculteurs, dont 580 ont atteint la note A, la plus élevée. Les agriculteurs obtenant des évaluations très faibles seront mis en contact avec les centres de transformation d’Opportunity International qui les aideront à améliorer leurs performances et ainsi leur solvabilité. Tamsin Scurfield reconnaît toutefois que l’existence de variables complexes échappant au contrôle des agriculteurs, comme la météorologie ou les ravageurs, signifie que les évaluations ne seront pas fiables à 100 %. La carte d’évaluation sera vraisemblablement utilisée en parallèle avec les processus décisionnels actuels d’Opportunity Bank, et ajustée à mesure que les données de prêt révèlent leur efficacité pour prédire les risques. À l’avenir, Opportunity International prévoit de créer une carte d’évaluation “statistique” utilisant les antécédents des clients et des algorithmes pour traiter les données et définir l’évaluation de crédit.

L'intégration de services

Ces schémas innovants d'évaluation du crédit peuvent aider à influencer les banques afin qu'elles tiennent davantage compte, lors de l'examen d'un dossier de prêt, de la myriade de facteurs qui peuvent réduire la capacité et la volonté de l'agriculteur de rembourser. Ceci peut contribuer à surmonter les obstacles à la bancarisation de l'agriculteur. Toutefois, afin d'atténuer de tels risques, les banques doivent tenir compte non pas uniquement des systèmes d'évaluation du crédit, mais aussi de la structuration innovante de produits financiers à travers l'intégration d'autres services comme l'agri-assurance, la formation et les contrats de commercialisation.

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