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Les petits pêcheurs se font entendre

Océan Indien

Les acteurs du secteur de la pêche dans l’océan Indien collaborent pour promouvoir une gestion durable des ressources marines et améliorer les conditions de vie des artisans pêcheurs, en leur facilitant l’accès à des marchés internationaux et aux technologies augmentant la valeur ajoutée des produits.

“Les petits pêcheurs de l’océan Indien retrouvent lentement mais sûrement leur place au soleil”, affirme Dorothée Ravomanana, représentante régionale de Smartfish, un programme de la Commission de l’océan Indien (COI) financé par l’Union européenne, visant à développer la pêche en Afrique. Une déclaration rassurante à propos d’acteurs longtemps marginalisés. La pêche est pourtant l'une des ressources renouvelables les plus importantes dont disposent les pays de l'océan Indien. Le secteur constitue aussi un important apport de protéines animales pour les populations de la région.

D’après la FAO, en 2010, la production cumulée de la pêche pour les pays membres de la COI atteignait 280 000 tonnes. De plus, le secteur génère plus de 130 000 emplois directs dans l’océan Indien et contribue à la subsistance de millions de personnes. En 2016, d’après les données nationales de Smartfish, il représentait 6,7 % du PIB à Madagascar, 10 % aux Comores, plus de 9 % aux Seychelles et 1 % à Maurice.

Un secteur dominé par des petits pêcheurs en difficulté

Les petits pêcheurs assurent une importante partie de la production halieutique de l’océan Indien. À Madagascar, 60 % de la valeur ajoutée du secteur (pêche, transport, transformation…) provient de la petite pêche, qui comprend les pêcheurs traditionnels et les pêcheurs artisanaux utilisant des embarcations non ou faiblement motorisées (moins de 50 ch). “La petite pêche est un filet social qui a une importance vitale pour les couches défavorisées aux Comores”, indique Coralie Gevers, représentante de la Banque mondiale aux Comores.

Les petits pêcheurs connaissent en effet des conditions de vie et de travail précaires. Ils produisent beaucoup avec peu de moyens. Par exemple, parmi les 85 000 pêcheurs malgaches, seule une dizaine d’entre eux dispose d’une vedette motorisée. La sécurité en mer et les moyens de conservation des produits de la pêche sont quasi inexistants.

Une “légitimité” désormais reconnue

Enfin, les petits pêcheurs n’ont pas accès au financement, pour renouveler leur matériel. “Les bailleurs de fonds éprouvent des difficultés à prendre des décisions convenables, car la voix des petits pêcheurs n’est pas suffisamment représentée”, regrette Andriamanana Hajaniaina, chef du service de la statistique au ministère de la Pêche.

Conscients de leur rôle prépondérant dans l’économie et de la nécessité de se rassembler, les petits pêcheurs de l’océan Indien ont créé, en octobre 2015, la Fédération des pêcheurs artisans de l’océan Indien (FPAOI) avec l’appui du programme Smartfish de la COI. À travers la FPAOI, les pêcheurs ont été formés au séchage et fumage du poisson, à la gouvernance des zones de pêche. Ils ont aussi pu partager leur expérience avec des artisans d’autres régions de l’océan Indien.

En 2016, la Fédération a intégré, en tant qu’observateur, la CTOI (Commission thonière de l’océan Indien), une organisation intergouvernementale en charge du suivi et de la gestion des activités thonières dans le Sud-Ouest de l’océan Indien. “Cela justifie sa légitimité et, du coup, leur voix est entendue par les partenaires”, fait valoir l’ancien secrétaire général de la FPAOI, Lala Ranaivomanana.

Sur le terrain, le groupement des armateurs TAZARA, membre malgache de la FPAOI, adhère à l’esprit collaboratif de la Fédération en travaillant de près avec les pêcheurs traditionnels locaux. En effet, afin de préserver la qualité des prises, TAZARA partage son unité de chambre froide avec les pêcheurs traditionnels, ces derniers ne disposant d’aucune infrastructure de conservation.

Une intégration au niveau national

Aux Seychelles, des pêcheurs artisans ont obtenu que les différents acteurs de la chaîne de valeur collaborent afin de promouvoir une pêche durable. Cette coopération avec l’Autorité des pêches des Seychelles, le bureau des normes, les hôtels et les consommateurs a débouché sur le lancement du programme “Label Seychelles”. Grâce à ce label, les consommateurs ont davantage confiance en la qualité des produits et les pêcheurs obtiennent de meilleurs prix de vente.

“Ce label permet d’augmenter la valeur ajoutée de la filière. La technique de pêche est sélective et vise des espèces spécifiques”, explique Beatty Hoarau, ancien président de l’Association des pêcheurs et armateurs des Seychelles (FBOA). Tous les acteurs sont soumis à un code de conduite respectant la qualité et la fraîcheur, la traçabilité, la durabilité des ressources et le respect de l’environnement.

À Madagascar, les petits pêcheurs deviennent des acteurs majeurs du secteur depuis que le code de la pêche leur a donné, en février 2016, plein pouvoir pour la gestion des ressources halieutiques, laquelle n’est plus l’apanage de l’État. Par ailleurs, le code de la pêche ainsi amendé et le plan d’aménagement de la pêche encouragent l'implication des organismes non gouvernementaux. Le mode d'exploitation des aires marines et les disciplines y afférentes sont confiés aux VOI (Vondrona Olona Ifotony), des communautés locales de pêcheurs qui se sont associées en groupement formel pour prendre en main la gestion des ressources halieutiques. Résultat, le stock de poissons est bien géré, l'environnement protégé, la production augmentée. De leur côté, des ONG forment les pêcheurs et les aident à accéder à des financements pour le renouvellement de leur matériel, tandis que l'État est en charge du suivi et du contrôle des activités.

À Maurice, il fut un temps où les relations entre pêcheurs et autorités n’étaient pas au beau fixe : en 2012, une coalition constituée autour du syndicat de pêcheurs à la palangrotte et de l’association Rezistans ek Alternativ avait protesté contre un accord bilatéral entre le gouvernement et l’UE, autorisant 86 navires thoniers senneurs à draguer les eaux territoriales mauriciennes.

Reste que la majeure partie des petits pêcheurs est encore peu armée pour se défendre : à Madagascar, plus de 75 % d’entre eux ont à peine un niveau scolaire primaire. Le directeur général de la pêche de Madagascar, Roginah Rafidison, nuance : “Outre la volonté politique, le problème est plus d’ordre économique que technique. Mais une fois la petite pêcherie consolidée, il conviendra de renforcer les collecteurs exportateurs professionnels en vue de booster la filière.”

Coopérer pour bien gérer les ressources de thon

Formée en 1993, la Commission des thons de l’océan Indien (CTOI) encourage ses 32 membres, dont une majorité d’Etats, à coopérer pour une utilisation optimale des stocks de thons dans la partie Sud-Ouest de l’océan Indien. Environ 740 000 tonnes de thon océanique, d'une valeur de 2 à 3 milliards d'euros, sont exploitées tous les ans dans cette zone.

Sur les 16 mentions présentées lors de la 21ème session de la CTOI, en Indonésie en mai 2016, huit “mesures de conservations et de gestion” ont été approuvées, y compris deux soumises par les Seychelles. “Nous avons demandé d’interdire le rejet des produits de la pêches dans l’océan, suggérant que ces poissons soient apportés sur la côte et utilisés pour l’export ou la transformation”, a expliqué le ministre de l’Agriculture et de la Pêche des Seychelles, Michael Benstrong. La CTOI a approuvé la réduction des permis de pêches du thon jaune de 15 % pour lutter contre la surpêche. Parmi les mesures présentées : un accord pour établir une liste des bateaux supposes avoir effectué des pêches illégales, non signalées ou non régulées, et la suppression de l’usage de filets dérivants.

Promouvoir les alliances pour la transformation de l’agriculture

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Présidente de l’Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA), le Dr Agnes Kalibata souligne l’importance du partage des connaissances et du développement de partenariats réalisés par le CTA, ainsi que la nécessité d’une alliance entre les parties prenantes pour augmenter l’impact de la numérisation de l’agriculture.

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