Le Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA) confirme sa fermeture pour la fin 2020.

Une agriculture de rupture pour des lendemains qui chantent

Opinion

 

En ce moment même, en Afrique australe, quantité de jeunes agriculteurs font des choses formidables. Ils sont ambitieux, ils ont soif de croissance et ils veulent se développer en créant des entreprises agroalimentaires rentables, qui offriront la même qualité de vie que d’autres professions. Ces agriculteurs manquent tout simplement de visibilité.

Ce que nous voyons lors d’événements comme le Forum sur la révolution verte en Afrique (AGRF), qui s’est tenu à Abidjan du 4 au 8 septembre 2017, ne représente qu’un petit échantillon de la foule d’agripreneurs qui existe.

Une nouvelle génération d’agriculteurs

Un nombre important de jeunes dirigeants d’entreprises agricoles commencent donc déjà à faire bouger les choses, mais leurs réussites ne sont pas souvent présentées sous la forme de récits célébrant la motivation et le leadership, pour offrir des modèles forts aux jeunes agripreneurs ambitieux en début de carrière. Il est essentiel de mieux diffuser leurs histoires, afin d’accélérer le développement de programmes de mentorat et de faire de la transformation de l’agriculture africaine une priorité stratégique.

L’agriculture va devenir plus complexe et dynamique. Aujourd’hui, le secteur agricole est axé sur l’information et les connaissances, il s’appuie sur les sciences et les données et il a recours aux TIC. Grâce aux nouvelles technologies, les agriculteurs sont désormais capables d’accomplir beaucoup plus avec beaucoup moins, conformément aux exigences actuelles du milieu. Les connaissances de base ne concernent plus les techniques de culture à proprement parler : les aspects pratiques et concrets ont cédé la place à l’esprit, la planification et la réflexion stratégiques. L’agriculture est devenue de plus en plus abstraite et fondée sur les données. Les agriculteurs d’aujourd’hui doivent donc être différents de ceux d’hier et posséder d’autres compétences. Ils doivent avoir fait des études adéquates pour pouvoir comprendre ce niveau de complexité accru. Il existe davantage de possibilités à l’heure actuelle, mais nous devons avant tout développer les compétences et les aptitudes appropriées chez les agriculteurs au moyen de programmes d’enseignement et de formation ciblés. Cela implique une modernisation et une professionnalisation de l’agriculture, ainsi que la possibilité pour les agriculteurs d’obtenir une rémunération compétitive pour leur dur labeur, afin d’attirer de jeunes entrepreneurs ambitieux et compétents dans ce secteur.

Une politique innovante

Cette nouvelle génération d’agriculteurs qui ont l’esprit d’entreprise laisse entrevoir des perspectives très prometteuses pour l’avenir de l’agriculture africaine. Toutefois, il est nécessaire d’améliorer le cadre politique, car il s’agit de l’élément le plus à même de favoriser des changements en profondeur. Les responsables politiques doivent faire preuve d’une plus grande originalité dans leur approche de la politique agricole, pour qu’elle puisse réellement soutenir les jeunes agriculteurs et permette à tous les acteurs du secteur d’exploiter pleinement leur potentiel économique. Les modifications des politiques et des instruments fiscaux et monétaires peuvent notamment avoir un impact fondamental. Une suppression des droits de douane à l’importation et de la TVA sur les équipements et/ou les technologies agricoles de base, par exemple, profiterait à tous les acteurs de la chaîne de valeur agricole. Des abattements fiscaux pour les entreprises et les start-up agricoles pourraient aussi faire une grande différence. Même une simple subvention des données qui permette aux agriculteurs d’avoir accès à plus d’informations sur le climat améliorerait sensiblement la résilience du secteur.

Une mesure particulièrement importante que les décideurs politiques doivent prendre consiste à subventionner les investissements dans le développement des infrastructures de réseau mobile pour permettre aux agriculteurs de tout le continent d’avoir accès à la téléphonie mobile. Cette technologie permet aux agriculteurs d‘accéder à des régions où il n’y a ni routes, ni ponts. Elle a des répercussions cruciales et inédites – des répercussions positives. Il s’agit d’un élément indispensable pour développer un secteur de l’agriculture plus axé sur le commerce. Plus important encore, cette technologie permet la démocratisation du secteur agricole en supprimant, dans une certaine mesure, l’asymétrie de l’information. Elle permet à tous les acteurs d’être connectés aux marchés et d’avoir accès aux connaissances et à l’apprentissage. Cependant, en l’absence d’infrastructures pour se connecter avec cette technologie, les agriculteurs ne peuvent pas exploiter ces possibilités. Ils demeurent isolés, tant sur le plan social et géographique qu’économique, et cela limite la modernisation du secteur et leur capacité d’améliorer leurs propres moyens d’existence.

Une politique intelligente, combinée au développement des infrastructures TIC et à une approche entrepreneuriale de l’agriculture, déclenchera une révolution de grande ampleur – le changement révolutionnaire que nous attendons nous.